TRAVAIL
de FIN de CYCLE
2006-2007
Josette
LAURENT
Atelier de
Mireille Vincent
Ecole des
Arts d’Ixelles
Belgique
MASACCIO
1401-1428
INDEX
Introduction (page 3)
Vie
de Masaccio
· Influence
de
Brunelleschi (page 5)
· Influence
de Giotto
(Cimabué, Giotto pages 6 et 7)
Œuvres :
·
La Trinité (page 8)
· Masaccio
et
Masolino (page 9)
· Les
fresques de
la
Chapelle Brancacci (pages
10 à 18)
· Autres œuvres (page 18)
Mort
de Masaccio (page 18)
Conclusion (pages
18 et 19)
Annexe
I : propos et citations
(page 20)
· Vasari
· Michel-Ange
· Léon
Battista
Alberti
· Eugène
Delacroix
· Marc
di Napoli
Annexe
II :
Ressemblance
étonnante, le
suaire et le visage du Christ de
Masaccio (page 21)
Annexe
III : Le travail de la
fresque
(page 22)
MASACCIO
1401-1428
Faire un choix parmi tous les artistes de
la Renaissance,
n’a pas été
chose aisée tant cette époque regorge de génies dans toutes les
disciplines.
Mon travail de fin de cycle clôture de nombreuses
années
pendant lesquelles mes différents professeurs à l’Ecole des Arts
d’Ixelles m’ont
prodigué leur enseignement artistique en peinture.
Les cours de l’Histoire de l’Art m’ont fait
découvrir la
période de
la
Renaissance et notamment un peintre
qui était, pour moi jusqu’à cette
année, totalement inconnu, et pourtant, cet artiste est l’un des plus
grands et
des plus importants peintres du 15ème siècle, initiateur de
la
peinture de
la
Renaissance.
Il s’agit de Tommaso
di Giovanni Cassai, dit Masaccio pour lequel j’ai de la tendresse et une grande
admiration.
.Il peint, au cours d'une carrière
aussi brève que fulgurante, une série de tableaux d'églises et de
fresques qui
marquent un point tournant dans l'art occidental par l'usage novateur et
résolu
qu'il fait de la perspective, par le réalisme des mises en scènes, des
décors
et l'extraordinaire intensité des sentiments qu'il exprime.
Il
faudra
vraiment attendre près d'un siècle pour qu'il se présente des génies de
taille
à lui succéder, un Léonard de Vinci [1] ou un
Raphaël.
Si
Masaccio avait
vécu plus longtemps et si le destin n’avait pas été aussi ingrat envers
lui,
cet artiste aurait peut-être éclipsé Raphaël [2] ,
qui
sait ? (Delacroix [3] « revue de Paris-1830 »
INTRODUCTION :
Après
la
terrible crise de 1348 [4] et la
lente reprise de la seconde moitié du siècle, Florence est en train de
devenir
la capitale d'un État régional. Avec la conquête de Pise (1406) [5] ,
la
ville réalise une aspiration séculaire et peut se donner l'illusion,
pour la
dernière fois, qu'elle constitue de nouveau, comme à la fin du XIIIe
siècle, le
centre de décision de l'histoire. C'est alors qu'on assiste à une
surprenante
reprise de cette confiance en la raison qui avait déjà été au fondement
de la
révolution de Giotto.
Masaccio
représente
dans la peinture ce bref moment de l'histoire de Florence.
Dans « sa vies de peintres », Vasari [6] fait une description très complète de
Masaccio. Ce texte présente très bien l’homme, l’artiste, l’époque et
bien
qu’elle soit un peu longue, et par respect, je le cite, ci-dessous, en
entier :
«…..
La Nature a pour
coutume,
lorsque survient une personne qui excelle dans une profession de faire
apparaître un autre concurrent de talent, en même temps et au même
endroit,
pour la raison qu'ils peuvent s'inspirer et s'encourager mutuellement.
Ce qui a
pour avantage, outre ce que cette coïncidence apporte aux deux
concurrents,
d'accroître leur ascendant sur les générations futures d'artistes qui
dépenseront ingéniosité et industrie pour acquérir la glorieuse
réputation dont
on ne saurait passer une journée sans louer les maîtres anciens.
Et ceci est vrai
car Florence a produit à la même époque Filippo (Brunelleschi), Donato
(Donatello), Lorenzo (Ghiberti), Paolo Ucello et Masaccio, chacun
excellent
artiste dans leur genre, et qui contribuèrent à dépasser la manière
grossière
et rude qui s'était maintenue jusqu'à leur époque. La magnificence de
leurs
ouvrages eut une telle influence sur leurs successeurs que les
techniques
propres à chaque métier atteignirent cette grandeur et cette perfection
que l'on
peut voir à notre époque.
Nous sommes
redevables à ces précurseurs de nous avoir montré la voie vers le grand
art: et
quant à la bonne manière de peindre, à Masaccio en particulier, car le
premier,
il perçut que la peinture est simplement la contrefaçon de toutes choses
vivantes, et l'art d'imiter leurs couleurs et leur dessin et que le
meilleur
peintre est celui qui parvient à reproduire le plus fidèlement ce qu'il
voit.
Masaccio qui avait
compris cela, peut être compté, grâce à ces continuelles études, parmi
les
pionniers qui nous ont débarrassé de la manière rude, imparfaite et
difficile
entravant l'art de peindre. Partant de ce principe, il conféra à ses
personnages de belles attitudes, du mouvement, de la fierté et de la
vie, un
relief propre et naturel à ces figures, ce qu'aucun peintre n'était
parvenu à
faire avant lui.
Parce qu'il était
doué d'un jugement très sûr, il reconnut que les figures qui ne posaient
pas
pied sur le sol, mais qui étaient comme sur la pointe des pieds,
manquaient
complètement de réalisme dans les parties importantes et que la couleur
indiquait clairement un manque de connaissance de la perspective chez
ceux qui
les avait peintes. Bien que Paolo Uccello ait tenté avec quelque succès
de
pallier cette difficulté, Masaccio introduisit de nouvelles techniques
et
accomplit des raccourcis, vus sous tous les angles, mieux que quiconque
ne
l'avait fait avant lui.
Ses peintures
étaient d'une grande douceur et harmonieuses, accompagnant les tons de
chairs
des visages et des corps dénudés des teintes des drapés qu'il dessinait à
l'aide de quelques plis larges et généreux, comme ils apparaissent
naturellement. Ce qui fut d'une grande utilité pour les artistes et ce
qui fait
que Masaccio peut en être considéré comme l'inventeur.
En vérité les
oeuvres réalisées avant lui peuvent se réclamer du titre de peintures,
mais les
siennes possèdent de la vie, sont vraies et naturelles par comparaison
avec
celles des autres. »
Tommaso
di
Giovanni Cassai, dit Masaccio, est né à San Giovanni Altura (aujourd'hui San Giovanni Valdarno, près de Florence),
le 21
décembre 1401 où se
trouvent
encore, dit-on, quelques figures peintes par lui dans sa première
jeunesse.
Il
a cinq ans,
en 1406, quand son père, artisan devenu notaire meurt. Cette
même année, naît son petit frère
surnommé Giovanni qui sera lui aussi peintre sous le nom de Scheggia. Sa
mère
Monna Jacopa de Martinozzo se remarie avec un marchand d’épices, Tedesco
des
Maestro Feo, veuf lui aussi, mais bien
plus âgé. Il garantira à la famille un
niveau de vie confortable.
Après
la mort
de son père, Masaccio suit une première formation chez son grand’père
qui
tenait un atelier de mobilier.
A16
ans, en
1417, il s’installe à Florence avec sa mère et son frère
avec lesquels il vivra jusqu’à sa mort.
Il
entre dans
l’atelier de Bicci di Lorenzo, et se familiarise avec les œuvres de
Donatello [7] (sculptures) qui deviendra son ami, son maître et son protecteur
et de
Brunelleschi [8] (architecture) qui sera également
son ami.
|
Wikipédia |
Photo Josette
LAURENT |
Photo
Josette LAURENT |
DONATELLO |
BRUNELLESCHI |
DAVID |
Statue équestre du
Guattamelata |
Le Dôme à Florence |
L’église San
Lorenzo |
Inscrit,
comme
presque tous les artistes, dans la corporation des Médecins et Pharmaciens,
il fait également partie du cercle des
novateurs [9] du peintre Masolino da Panicale, (1353-1440?), natif du même village que
lui. Ils
deviendront amis malgré leur différence d’âge.
.
Brunelleschi
enseigna à Masaccio la
perspective linéaire et les applications qui en découlent :
Vasari
dira
de Brunelleschi, dans « vies des peintres : « il étudia beaucoup la perspective
alors mal
appliquée, à cause des nombreuses erreurs que l’on commettait ; il y
perdit beaucoup de temps, jusqu’à ce qu’il eût trouvé par lui-même une
manière
de la rendre plus juste et parfaite, en faisant le plan, le profil et
les
intersections, découverte vraiment ingénieuse et très utile aux arts du
dessin.
Il y prit tellement de plaisir que de sa main, il retraça la place San
Giovanni, avec la répartition des marbres noirs et blancs incrustés sur
les murailles
et dont les bandes allaient en diminuant avec une grâce singulière
….. »
Brunelleschi
en
fait la démonstration à partir d'une expérience réalisée sur la place
San
Giovanni à Florence en 1415 avec un miroir et un dessin monté sur une
planchette. Il réalise d'abord un dessin du baptistère de Florence selon
une
perspective rigoureuse (ligne d'horizon, point central et lignes
convergentes).
Son dessin est monté sur une planchette dans laquelle il a percé un trou
pour
voir l'image du baptistère de la cathédrale se réfléchir dans le miroir.
Ainsi,
n'importe quel observateur se tenant à l'endroit où le dessin du
baptistère fut
réalisé, peut constater qu'il se superpose parfaitement à l'édifice
réel,
créant ainsi une illusion parfaite de la réalité.
|
(photos
Internet) |
Si Brunelleschi fut
celui qui a démontré les principes de
la perspective linéaire, la véritable explication
scientifique du phénomène sera réalisée par le théoricien et
architecte, Léon Battista
Alberti (1406-1472) dans son traité Della
Pictura (1435). Il y explique que l'oeil constitue le
point de
vue à partir duquel se construit une pyramide visuelle, l'oeil étant le
sommet
et la surface plane du tableau où se forme l'image constituant la base.
Masaccio
connaît l’art de Giotto.
L'oeuvre
de
Giotto (1267-1337) marque véritablement la rupture avec l'art
traditionnel du
Moyen-Âge. Il introduit, dans la peinture de ses fresques un souci de
réalisme
tout à fait nouveau et inédit dans l'art occidental. Les 28 fresques
ornant
l'église supérieure de la basilique Saint François à Assise qui
illustrent le
génie de ce peintre annoncent
la Renaissance du
XVe
siècle. La perspective, encore empirique, est suggérée par la
représentation
des édifices dont l'architecture s'inspire déjà de l'héritage de
l'Antiquité.
On sait peu de chose
de la vie et
de la formation de Giotto. Né près de Florence en 1267, décédé en 1337, entré dans l’atelier de CIMABUE
en 1272, il voyage à Rome en 1291.
Vasari note :
" On
rapporte que Giotto, dans sa jeunesse, peignit un jour d'une manière si
frappante une mouche sur le nez d'une figure commencée par Cimabue que
ce
maître, en se remettant à son travail, essaya plusieurs fois de la
chasser avec
la main avant de s'apercevoir de sa méprise. " Lui aussi
dépassa le Maître.
A
la fin du
Moyen Age, le style byzantin règne toujours dans la peinture dont un des
maîtres de l’époque fut Cimabue. Qui assure le renouvellement de la
peinture byzantine en rompant avec son formalisme et en introduisant des éléments de l'art gothique,
tels que le réalisme des expressions des personnages.
La légende, aussi
révélatrice que pittoresque, dit que c’est lui qui découvrit un jour le
jeune
berger Giotto. C’est l’histoire du maître dépassé par son élève, mais
c’est en
même temps le récit de la confrontation de deux époques : celle du
Moyen
Age et celle de
la
Renaissance, de l’ombre et de la lumière, de l’irréel
et de
la nature
(Photo Internet) |
CIMABUE 1240Florence-1302 Florence
La Majesté de Sainte
Trinité (Florence Offices) Vierge aux anges, vers 1290
Le travail de Cimabué, Maître de Giotto
ressemble à
l’art byzantin, aux icônes [10] .
Le fond doré est une manière
d’affirmer la
transcendance, le sacré |
(Photo Internet) |
GIOTTO
1267
Vespignano
1337 Florence
Madone en
majesté
entourée de saints et d'anges (vers 1305-10)
Les personnages de Giotto sont plus expressifs
que
ceux de Cimabue. On devine les formes du corps de
la Vierge chez Giotto
tandis
que les drapés de Cimabue les cachent.
Chez Giotto, les anges sont
bien posés dans l’espace
et début de perspective. |
(Photo Josette
LAURENT juin 2009)
|
CIMABUE
On voit sur le crucifix les
dommages causés par les
dernières inondations de novembre 2006
|
(Photo Josette
LAURENT juin 2009)
|
GIOTTO
Crucifix 1316 bois Florence
Santa Croce Florence
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
La chapelle des Scrovegni (Reginaldo Scrovegni, usurier célèbre
de Padoue) de Giotto est une des
réalisations les plus magistrales de
l’histoire de l’art occidental. Ce cycle de peintures murales réalisées
au
début du XIVe siècle présente une unité et une cohérence inouïe, une
gamme de
couleurs d’une rare vivacité et des figures dotées d’une grande force
expressive. C’est l'un des tournants de l'histoire de la peinture européenne.
Les
personnages
de Giotto ont quelque chose de naturel, de profondément humain. Le
peintre a cherché à camper ses scènes dans un environnement terrestre
qui
puisse, tant que possible, être crédible. Evidemment, les architectures
semblent trop petites par rapport aux personnages, mais elles jouent
leur rôle
de décor théâtral. Si elles l'imposèrent dès son époque comme un artiste
fondamental, on peut constater aujourd'hui combien son influence fut
essentielle
sur l'art et la pensée universelle, en Italie comme dans toute l'Europe.
Autres œuvres
de Giotto. (Photos Internet)
Madone à
l’enfant
1320- bois |
St François
recevant les
stigmates |
St
François prêchant aux oiseaux |
L’apparition à un frère |

1320
fresque |
Les
crucifix
peints sont les crucifix du pauvre, imitant l'orfèvrerie (auréole
poinçonnée
comme un objet d'orfèvrerie). Sur
la
Croix peinte de Giotto, la tête du Christ et l'auréole
sont
penchées vers le fidèle. Le Christ est entouré de
la Vierge et de St
Jean. Le
pélican qui s'arrache les entrailles pour nourrir sa progéniture
symbolise le
Christ donnant sa vie pour racheter le péché du monde.
Masaccio a vu les œuvres de Cimabue et
surtout celles de Giotto. Il s’en est
imprégné mais n’a pas copier le Maître.
On peut
considérer que l’œuvre de Masaccio prend le relais sur celle de
Giotto et que la renaissance picturale commence.
Masaccio commença à peindre à l'époque où
Masolino da
Panicale travaille dans la chapelle Brancacci de l'église des Carmine à
Florence.
La 1ère grande
réalisation de Masaccio fut les fresques qu’il exécuta pour l’Eglise
Santa
Maria del Carmine, église construite en 1268 dans le quartier ouest de
la
ville, au-delà du fleuve.
Ces fresques se
distinguent par
le brio du clair-obscur et l’application des lois de la perspective
découvertes
par Brunelleschi. L'exemple le plus célèbre de cette application est la Trinité [11] qui fut retrouvée dans
l'église Santa Maria Novella, en 1861,
cachée derrière La Madone du Rosaire, un tableau
qu'avait
peint Vasari.
On prétend que celui-ci l'aurait caché volontairement pour le sauver.
La trinité 1427 Masaccio (Photo
Internet)
La trinité 1427 Masaccio
Cette
Trinité,
est la première œuvre picturale réalisée selon les nouvelles règles
mathématiques
de la perspective découvertes par Brunelleschi. Elle marque le début de
la Renaissance.
Fresque
de
6.50m de haut sur 3m de large, 25 jours de réalisation, elle donne
l'impression
à l'observateur de regarder à l'intérieur d'un espace tridimensionnel.
Derrière
le
Christ en croix, un plafond voûté à caissons. Les traits de perspective
furent
peut-être tirés par Brunelleschi lui-même car ils étaient de grands amis
malgré
leur différence d’âge. Selon Vasari,
cela donne l'impression que la voûte "troue le mur".
La
partie
inférieure de la fresque, très sobre, a été traitée avec une perspective
frontale afin d’être en harmonie avec le reste de l’église et le regard
du spectateur.
Beaucoup d’artistes ont utilisé, par la suite, ce procédé.
L'autre
innovation
est le réalisme et l’humanité de tous les personnages peints par Masaccio. C’est nouveau à l’époque. On voit
Jésus, Marie, St Jean, Dieu et, de chaque côté, de profil, les 2
commanditaires.
En dehors du plan principal, sur la partie inférieure on voit un
squelette
peint dont la signification est : « souviens-toi
de la mort ». Les œuvres d’art, les sculptures, les
peintures, ont, à cette époque là, un
but de morale et d’enseignement. Ce
squelette apprend aux fidèles que la vie n’est pas éternelle, que l’on
meurt, que
l’ont devient comme le squelette, et que, plusieurs étapes sont
nécessaires
pour atteindre le Paradis. Il faut d’abord mourir, quitter son enveloppe
terrestre, et, pour atteindre le Paradis après la mort, il faut prier
durant sa
vie et prier Jésus.
Masaccio
et Masolino :
Quel que soit l'artiste qui ait
enseigné à Masaccio à
empâter les couleurs, il faut bien garder présent à l'esprit qu'il fut
dès le
début, l'enfant chéri (c’était le plus jeune) du groupe des novateurs
qui se
réunissait autour de Brunelleschi.
A l'âge de dix-neuf ans, Masaccio était
un artiste
entièrement formé et déjà célèbre.
En
1422, il
quitte l’atelier de Bicci di lorenzo pour échapper au
système humiliant de l'atelier et s'installe à son compte. Il pouvait
non
seulement avoir son propre atelier, mais influencer d'autres jeunes
peintres. Cela
entraîna pour lui des difficultés financières, attestées par les
documents. Ce n'est pas là un
fait secondaire si l'on veut comprendre la conception nouvelle,
individualiste,
que Masaccio, en homme de
la
Renaissance, se fit de son métier d'artiste. Le
nouveau
statut social du groupe des novateurs implique la recherche de nouvelles
formes
d'organisation du travail et celle de nouveaux débouchés sur le marché
de la
peinture. On sait par les documents historiques que Donatello, l'ami et
le
protecteur de Masaccio, choisit quant à lui les formes juridiques de la «
compagnie ». Dans la « compagnie », deux artistes indépendants se lient
pour un
temps déterminé afin d'obtenir plus de commandes et contrôler plus
facilement
une grande partie du marché. Ce rapport de complémentarité économique
élargit
énormément l'horizon du vieil atelier. Dans la « compagnie », les
personnalités
ne tendent pas à se fondre. Mais les deux artistes collaborent selon des
méthodes rationnelles de répartition du travail. Donatello, bien qu'il
soit le
meneur de jeu, n'arrivera jamais à faire de Michelozzo son alter ego,
pas même
d'un point de vue purement artistique.
On ne connaît pas aujourd'hui, par
insuffisance de
documents historiques, quel type de rapports économiques Masolino et
Masaccio
décidèrent d'instaurer entre eux, en cette même année 1425 qui a vu
naître la «
compagnie » de Donatello et de Michelozzo. Cependant, tout laisse croire
que Masolino
et Masaccio furent, en droit et en fait, sur un pied d'égalité absolue.
Il
n'est pas douteux que Masolino n'a
jamais été capable de comprendre et de s'approprier les innovations de
son
jeune compatriote. Mais il faut aussi se demander jusqu'à quel point il a
vraiment voulu le faire, et s'il a vraiment cherché à dépasser un accord
stylistique capable de donner à l'œuvre une cohérence suffisante pour
que les
commanditaires ne voient pas la différence de main.
L’élève
dépasse
le Maître et c’est Masolino qui
subira l’influence de Masaccio. La présence du génial Masaccio semble
avoir
donné une impulsion à l’activité de Masolino trop standardisée sur les
modèles
de la fin du gothique, notamment par l’introduction de nouveaux
principes de
perspective et de naturalisme.
Travail en commun : Masolino
et son élève Massacio:
La
vierge à l’Enfant et Sainte-Anne :
Ce
tableau a été peint pour l'église San'Ambrogio. Il est, aujourd’hui
aux Offices
Masolino exécutera Sainte Anne et tous les
anges, à
l'exception de l’ange situé à l'extrême droite, peint par Masaccio qui
peindra aussi
la Vierge et l'Enfant.
|
Photo Internet |
Les
fresques de la chapelle
Brancacci :
En 1424, le riche
banquier Felice Brancacci [12] commande à Masolino da Panicale la décoration de la chapelle lui
appartenant
dans l’église Santa Maria del Carmine.
Un
contrat est
alors passé entre le commanditaire et l’artiste qui détermine la durée des travaux, le nombre de
scènes à exécuter (un projet a certainement été établi par Masolino),
les
couleurs, la quantité de couleurs, le poids donc le coût exact au poids,
le
temps de préparation, le délai de transport pour faire venir les
matières
premières pour ces couleurs, chaque atelier broyant ses propres couleurs
à
partir d’éléments végétaux, etc.… tout était indiqué dans le contrat.
Certains
pensent
que Masolino s’apercevant de l’ampleur des peintures à exécuter, et
voyant qu’il ne pourra pas respecter l’échéance du contrat, a demandé
l’aide de
son élève Masaccio.
A
l’époque,
un élève reste pendant 10 ans dans l’atelier de son maître. Apprenti
pendant 4
ans, il balaie l’atelier, broie les
couleurs, les mélange à l’huile, (l’huile existe déjà mais elle sera
répandue
un peu plus tard….). Puis, il devient Compagnon.
Il exécute alors partiellement un
tableau. Après 10 ans, il devient à son tour Maître, après avoir
présenté un
travail de maîtrise et avoir été reconnu
par les siens. Il peut, alors, à son tour, ouvrir un atelier et
enseigner son art.
Masolino demande l’aide de son élève Masaccio. Il
quitte ensuite
Florence pour
la
Hongrie,
en 1425.
De 1425 à 1428, Masaccio peint, seul, les
fresques. En
1428, il quitte Florence et part pour Rome. Après le départ de Masaccio,
les
travaux des fresques de la chapelle seront arrêtés. La famille Brancacci
ayant
soutenu les opposants, tombera en disgrâce et s’exilera. Les fresques
seront
reprises par Felipino Lippi en 1481 et
la chapelle achevée en 1485.
En
1425, quand Masaccio succède à son maître dans la chapelle
Brancacci, il n'a que vingt-trois ans. S'il y fit sa réputation, il n'y
fit pas
fortune. Les registres du cadastre de 1427 constatent qu'à cette époque
il vit,
avec son frère Giovanni, chez sa mère, une pauvre veuve. Il ne possède
rien en
propre, doit 102 livres à un peintre, six florins à un autre. Presque
tous ses
effets sont en gage dans les comptoirs de prêts. Il gagne, en tout, six
sous
par jour et paye fort irrégulièrement son aide, Andrea di Giusti, car
celui-ci
l'appelle en justice pour le règlement de son salaire. Est-ce cette
situation
embarrassée qui le chasse de Florence? Est-ce l'espoir d'une commande qui l'appelle à Rome?
Toujours
est-il
qu'on le voit tout à coup, en 1428, abandonner son œuvre inachevée pour
se rendre dans
la Ville
éternelle. Une déclaration laconique d'un créancier non payé constate,
quelque
temps après, que Masaccio y est mort.
Tous
ces
détails navrants confirment le dire de son biographe (G. Lafenestre (1837-1919) : «Il fut très distrait, très en l'air, comme quelqu'un qui, ayant toute
son
âme et sa volonté aux choses de l'art, n'a cure de lui-même et encore
moins
d'autrui. Et pour ce qu'il ne voulut penser jamais en aucune manière aux
soins
et choses de ce monde, pas même à se vêtir, n'ayant coutume de toucher
ses
deniers de ses débiteurs qu'en un besoin extrême, au lieu de Tommaso,
qui était
son nom, on l'appela partout Masaccio, non qu'il fût vicieux (il était
la bonté
en nature), mais à cause de cette grande insouciance. Il était
d'ailleurs si
aimable en rendant service à autrui, qu'on ne pouvait désirer plus. »
Presque
complètement préservée du désastreux incendie de 1771, la chapelle
conserve sur
ses parois les fresques que l'on peut encore admirer aujourd'hui, chefs-d'œuvre picturaux de Masolino et de son
extraordinaire élève Masaccio.
Eglise Santa Maria del
Carmine
Photo Internet |
Photo Josette Laurent |
LaChapelle
Brancacci
Douze panneaux entourant l'autel, répartis sur deux
niveaux
et 3 murs |
Photo Internet |
Fresques supérieures (de gauche à
droite)
1/ Adam et Eve/
Bible /
Masaccio
2/ Paiement du
tribut/ Actes des
Apôtres /Masaccio
3/ Prédication de Saint Pierre (Masolino)
4/ Le baptême des néophytes/
Actes des Apôtres/Masaccio
5/ Saint Pierre
guérissant
un infirme et
la Résurrection de Tabita/ Masaccio
6/ Adam et Eve avant le péché /Bible/ Masolino
Fresques inférieures (de gauche à
droite).
7/
St Pierre en prison /Lippi
8/ St Pierre ressuscitant le fils de Théophile/La légende Dorée /
Masaccio et
Lippi
9/ Saint Pierre suivi de Saint Jean (Masaccio)
10/ Distribution des biens et mort d'Ananias (Masaccio)
11/ Dispute avec Simon le magicien/ martyre de St Pierre (Lippi)
12/ Saint Pierre libéré par un ange. |
|
|
|
|
La partie inférieure
du mur
gauche a été commencée par Masolino

Photo Josette Laurent
La comparaison des
fresques qui
lui appartiennent dans la chapelle Brancacci avec celles de Masolino,
son
prédécesseur, et celles de Filippino Lippi, son successeur, démontre
clairement
sa supériorité. Que l'on compare, pour la poésie de la conception, pour
la
correction et pour la plénitude des formes, pour l'intensité de
l'expression,
l'Adam et Ève du maître dans le Péché originel et l'Adam et Ève
de
l'élève dans l'Expulsion du Paradis terrestre, on sentira, du
premier
coup d'oeil, la grandeur du progrès accompli. La composition de
Masaccio, si forte et si dramatique, s'imposait si bien à l'imagination
comme
une composition définitive que Raphaël lui-même, en la répétant, n'y
devait
presque rien changer.
«Entre
Masolino da Panicale et Masaccio collaborant à un même ensemble,
on croirait qu'il y a l'écart de deux générations, Masolino est un
maître, ses
fresques à peu près effacées de Castiglione d'Olonna ont encore, dans
quelques
traits épargnés, la poésie de leur insidieuse pureté, ses figures d'Adam
et
d'Eve, à la chapelle Brancacci, respirent le charme des beaux nus
d'Italie à
l'époque qui précède la maturité historique, – mais Masaccio a le poids
des
draperies, la lenteur des rythmes, le calme de l'espace entre les
figures et
cette richesse de substance qui, sans bossuer le mur, donne à la
peinture la
pleine et paisible autorité de la statuaire.» H. FOCILLON, Art
d'occident, tome 2,
Le thème du
Paradis terrestre et du Paradis perdu appartient au cycle des fresques
du
Carmine.
Masaccio et Masolino donnèrent une représentation
d'Adam et Ève très différente :
photo
Josette Laurent
MASACCIO
Adam et Eve chassés du Paradis
(Haut du pilier gauche en face de
celui de Masolino).
Masaccio
représente Adam et Eve, après le péché, chassés du Paradis par la colère de Dieu (on aperçoit une porte étroite accentuant la tragédie,
l’ange est là pour surveiller…) Décor dépouillé, ombres, cri...le
portrait
d’Eve est influencé par
la Vénus
Jacopo della Quercia. [13]
Masaccio connaît l’anatomie, la
musculature… |
photo Josette
Laurent
MASOLINO
La tentation d’Adam et Eve
(Haut du pilier droit)Masolino représente Adam et Eve au Paradis, avant le péché. Ils sont assez
hiératiques et figés mais d’une beauté remarquable. Le style de
Masolino,
fidèle au gothique international, élégant, reste classique. Avec les emménagements de l’église au
18ème,
la fresque a perdu une trentaine de cm de haut. |
. Le
paiement du Tribu Masaccio
(Photo Josette laurent)
Sujet religieux, selon
St
Matthieu
On
a écrit que cette peinture de Masaccio, "tel un schisme, a provoqué
une scissure dans l'histoire de la peinture italienne" (L.Berti).
Datable de 1425, elle fut réalisée en 28 jours. Narration de la scène
des
Évangiles en trois temps :
La
scène, du Tribut
de saint Pierre, où les douze apôtres, gravement drapés, se groupent
si autour
du Christ si naturellement, dans un beau paysage, résout du premier
coup, avec
une étonnante et durable autorité, les difficultés de la composition
expressive. Trois scènes successives de la même action, suivant l'usage
du
temps, s'y juxtaposent dans le même milieu avec une clarté singulière,
et le
groupe central est disposé avec une grandeur ferme et simple que
personne ne
devait dépasser. 1. Obéissant à la demande du gabeleur vu de dos, Jésus
entouré
des Apôtres, ordonne à Pierre de trouver une pièce de monnaie dans la
bouche
d'un poisson. 2. À gauche, Pierre, "dans sa tentative de retirer
l'argent
du ventre du poisson, a le visage en feu à force d'être courbé"
(Vasari). 3.
À droite, Pierre paie le tribut c'est-à-dire l'impôt pour le Temple au
receveur
romain.
Architecture
de
la Renaissance,
très dépouillée, dont Chirico [14] s’est inspiré (pas d’éléments décoratifs). La perspective est
atmosphérique,
brume qui va influencer Léonard de Vinci. Le paysage urbain
s’incorpore à
merveille au paysage de la montagne et de la merLes personnages sont
sculpturaux, vivants, leur position est inspirée de la sculpture des 4 Saints couronnés de Nina di Banco. Eglise
Orsanmichele à Florence
Photo
Josette
Laurent |
|
En
exécutant cette
fresque, Masaccio a fait un parallèle avec la vie religieuse et la vie
quotidienne (réforme fiscale de 1427 à Florence instituant une
déclaration des
revenus) et exécuté le portrait de ses contemporains. En même temps, les
problèmes de la perspective, du clair-obscur, du modelé, y sont tous
abordés à
la fois et déjà résolus, sans ostentation et sans effort. La supériorité
de
Masaccio, comme sera plus tard celle de Raphaël, est d'être grand sans
le
savoir et d'être savant sans le dire.
La Résurrection du fils de Théophile (Masaccio)
à
droite : Saint Pierre assis en
chaire. (Masaccio/ Lippi)
|
Photo Internet |
à l'extrémité droite
de la scène.
Masaccio s'est représenté, le regard tourné vers nous, avec à sa droite,
Masolino, plus petit, et derrière Léon Battista Alberti et Brunelleschi
Où avait-on vu auparavant
des figures
aussi vivantes se détacher, avec un relief si juste, dans une atmosphère
si
respirable? Où aurait-on trouvé une série de portraits contemporains,
aussi
frappants et expressifs que ces rangées de citoyens florentins groupés,
dans
leurs longues robes, de chaque côté de
la Résurrection de l'enfant » (la résurrection du fils de Théophile) devant un
mur de
marbre surmonté de pots de fleurs, sous un ciel bleu de printemps?
La résurrection du
fils de
Théophile inspirée de
la Légende
Dorée, se divise aussi en 3 parties.D’après une
histoire
apocryphe tirée de
La
Légende dorée, l’apôtre Pierre qui prêchait la foi du
Christ, fut jeté en prison par Théophile, le
préfet païen d’Antioche. Il y serait demeuré sans l’intervention de son
frère
Paul qui instruisit le prince des pouvoirs de Pierre, parmi lesquels le
don de
ressusciter les morts. Apprenant cela, Théophile donna son accord à la
libération
de l’apôtre, à une condition, apparemment impossible : la
résurrection de
son fils mort depuis quatorze ans. Dans ce portrait du fils, certains
voient le
fils d’un Visconti qui a été assassiné ; il
renaît de ses cendres/ le portrait de
Théophile est le portrait de Visconti/ portrait du chancelier de
Florence
médiateur entre Florence et Milan. Portrait du personnage mains
croisées :
ennemi des Visconti.
Saint Pierre
guérit les malades avec son ombre Masaccio
Cette
œuvre est coincée entre l'angle du mur et un autel moderne
Photos Josette |
Laurent |
Le premier malade est déjà debout et rend grâce au saint.
Le second se relève. Le troisième est encore à terre, infirme, la
jambe
droite atrophiée. Leurs regards convergent vers Pierre. Ni Pierre ni
Jean ne
les regardent. La scène est conçue d'une manière très vivante : c'est
l'effet
produit par la marche des apôtres dans cette rue tracée en oblique
sous nos
yeux ; ils viennent vers nous. On peut y voir le triomphe du
réalisme du
Quattrocento |
La
distribution des biens et la mort
d'Anania Masaccio
Photo Josette
Laurent |
L'épisode est tiré des Actes des Apôtres.
Saint Pierre et saint Jean
faisaient la
charité, distribuant des biens aux premiers chrétiens qui vivaient en
communauté d'hommes pauvres et égaux, où l'on proscrivait
l'accumulation
personnelle de biens et l'enrichissement de l'individu. Alors pourquoi
cette
scène?
Anania a menti au sujet du
prix de vente
de ses terres et en a conservé une partie. Le mensonge fait qu'il
tombe
foudroyé aux pieds de Saint Pierre.
Sa femme Saffira
(Saphir) tient
leur enfant dans ses bras et écoute saint Pierre. |
Le Saint Pierre et
le Saint Jean guérissant les malades, le Saint Pierre
distribuant les
aumônes témoignent, d'un esprit d'observation libre et hardi, qui ne
craint
pas d'introduire dans l'art, quand il le faut, la représentation franche
et
émue des infirmités physiques et des misères morales. On ne peut donc
être
surpris que tous les Quattrocentisti, si ingénieux et si savants,
bien
plus habiles pour la plupart, soient venus demander, dans cette petite
chapelle, des leçons de simplicité, de noblesse et d'harmonie à ces
humbles
fresques interrompues par la misère et par la mort, sans pouvoir
ressaisir
toute l'âme disparue du pauvre Masaccio. Il faudra vraiment attendre
près d'un
siècle pour qu'il se présente des génies de taille à lui succéder, un
Léonard
de Vinci ou un Raphaël!
Le baptême des
néophytes (Masaccio)
C'est avec de belles
figures nues
comme celles des néophytes en train de se déshabiller dans le Baptême
de
saint Pierre, que le sentiment de la beauté corporelle rentre
décidément
dans la peinture.
(photo Internet)
La
Guérison de l'infirme et
la
Résurrection de Tabita (Masolino et Masaccio)
(Photo Internet)
On
peut
considérer la naissance de la peinture moderne comme ayant eu lieu en
1426 dans
l’église Santa Maria del Carmine à Florence avec les fresques qu’il
exécuta
seul.
Pour
la
première fois le modelé est obtenu avec de l’ombre et de la lumière,
chaque
figure se meut à son plan, repose solidement sur le sol et semble bouger
avec
aisance. Il n’y a plus la gaucherie des gestes des personnages des
Primitifs et
les architectures sont proportionnées aux figures : tout
archaïsme
a
disparu.
Masaccio
a le
sentiment des valeurs : il projette de grands ombres et emploie des
couleurs rompues.
Désormais la peinture
sera dans
son véritable domaine qui est celui de la lumière.
Autres
œuvres de Masaccio : (Photos
Internet)
|
|
|
|
La Vierge avec 2 anges |
Portrait de jeune homme |
Portrait |
|
|
|
|
|
|
Crucifixion |
La Madone de l’Humilité |
La Vierge
à l’enfant |
En 1425,
année du Jubilée, Masaccio est à Rome. Il y retrouve Masolino.
La première commande
artistique
significative se produit en 1425, lorsque Martin V commanda à Masaccio la réalisation du polyptyque de
la
Madone de
la
Neige pour la chapelle Colonna à Santa Maria Maggiore.
Masaccio et Masolino
peignirent
ensemble ce Polyptique.
Photo Internet
Cette commande marque
le départ
vers l'assimilation d'une sensibilité humaniste, qui se répandra plus
tard dans
l'ambiance culturelle romaine.
Mort de
Masaccio.
Il mourut à
Rome, en 1428, de mort mystérieuse, probablement empoisonné.
Vasari relate dans son
ouvrage « vies des peintres
« :
« On
dit qu’en apprenant sa mort, Filippo Brunelleschi
s’écria : » nous avons fait une perte immense en
Masaccio ! » Il ressentit une profonde douleur, d’autant plus
qu’il
s’était appliqué longtemps à lui enseigner quantité de problèmes de
perspectives et d’architecture. Masaccio fut enterré dans l’église del
Carmine,
l’an 1443, et comme, pendant sa vie, ses concitoyens l’avaient peu
apprécié, on
ne prit pas soin de rappeler sa mémoire par quelques inscriptions sur
son
tombeau. »
CONCLUSION
Comme pour
l'architecture et pour
la sculpture, ce fut un Florentin de génie qui ouvrit la voie nouvelle à
la
peinture.
Masaccio était, au
dire de
Vasari, l'ami de Brunelleschi et de Donatello; mais, s'il accomplit
comme eux
la rénovation, ce fut avec moins de violence: d'abord il eut la sagesse
de ne
point copier les sculptures antiques, qui auraient fatalement enlevé à
la
peinture sa chaleur et sa liberté; puis il ne copia dans la réalité que
ce
qu'elle lui offrait de mesuré et d'harmonieux.
L'habile artiste qui
fut son
maître, Masolino da Panicale avait fait dans ses fresques de Castiglione
d'Olona, en Lombardie, et du Carmine à Florence, la première tentative
pour
ranimer la peinture par l'imitation de la vie ordinaire; non seulement
il
copiait des costumes italiens contemporains, mais il
introduisait dans ses scènes religieuses
des portraits énergiques et des figures nues d'un dessin précis, et,
tout en
conservant le paysage traditionnel des œuvres de Giotto, il montrait
dans
l'architecture un début de perspective linéaire répandue par
Brunelleschi.
Toutes ces
indications, Masaccio
les développa sans effort, de manière à atteindre dans le dessin des
têtes et
des corps, par la simplification et la généralisation du modèle, une
noblesse
qui sera à peine dépassée par les peintres futurs.
D’un caractère affable
et ouvert,
Masaccio était très lié avec Brunelleschi, qui lui enseigna la
perspective, mais
aussi avec tous les réalistes enthousiastes et tous les savants
laborieux qui
formaient son entourage. La sincérité de Donatello ne ferme pas ses yeux
à la
noblesse de Ghiberti [15] ;
s'il estime Uccello [16] ,
il
n'apprécie pas moins Gentile da Fabriano [17] et
Fra Angelico [18] .
Sa supériorité fut
d'opérer, sans effort apparent, par l'essor naturel d'un esprit grand
ouvert,
la fusion de toutes les qualités éparses chez ses compatriotes
Naturaliste convaincu,
avide de
vérité, il abordait de front toutes les difficultés techniques et les
résolvait
avec une aisance qu'on ne connaissait pas encore. La science, dans
l'art, ne
l'effrayait pas, mais il ne sacrifia point l'art à la science.
.
Sa gloire fut de
réaliser, avec
la force d'un tempérament plus viril et l'élan d'une imagination plus
haute que
n’importe quel autre artiste, ce qu'avait été naïvement tenté.
Tout en travaillant au progrès technique, il
sut conserver de la tradition de Giotto ce qui était durable, les amples
draperies, les gestes majestueux, les compositions frappantes…l'accord
de
l'idéal et du réel, de la poésie et de l'exactitude, de la grandeur et
de la
vérité.
A
mi-chemin
entre Giotto et Raphaël, portant comme eux dans ses mains une grande
lumière,
Masaccio est le véritable héritier de l'un et l'ancêtre évident de
l'autre. Son
œuvre modeste n'a pas eu moins d'action que leur œuvre immense.
Ce
fut ce
pauvre jeune homme, peu prisé de ses compatriotes, sauf de quelques
artistes,
qui, par un coup d'audace, résumant, sur quelques mètres de muraille,
tous les
progrès accomplis par les efforts individuels depuis un siècle, marqua
de
nouveau au génie italien sa destinée, en le remettant, avec toute la
force
d'une technique perfectionnée, dans la voie large et droite ouverte par
Giotto.
Il
réunit, dans la petite chapelle Brancacci
dans
l’église Maria del Carmine, ce que devait, plus
tard, réunir Raphaël : la pensée du XIVe siècle et la science du XVe.»
Photo Internet
Annexe
I Propos et citations
sur Masaccio
Vasari écrit
dans son ouvrage de la vies des peintres :
Devant les fresques de la chapelle Brancacci …. « un jour, Michel-Ange donna, en ma
présence, les plus grands éloges à ces figures qui, disait-il, devaient
être
plus vivantes du temps de Masaccio. »
Et lui-même
dit :« …une
quantité de dessinateurs et d’artistes en tout genre ont constamment
fréquenté
cette chapelle (la chapelle Brancacci) qui renferme des têtes si belles
et si
expressives que l’on peut dire avec assurance qu’aucun maître de cette
époque
s’approcha autant de Masaccio des peintres modernes. Ses efforts
méritent donc
des louanges infinies, surtout après avoir créé le beau style de notre
époque ; et, pour prouver la vérité de ce que j’avance, je dirai
que tous
les peintres et sculpteurs qui sont venus étudier dans cette chapelle et
y
prendre des copies sont devenus des maîtres imminents, tels que Fra Giovanni de Fiesole, Filippino Lippi,
Michel-Ange, Raphaël d’Urbin, Léonard de Vinci et quantités
d’autres……… »
Il est le seul peintre que cite Léon Battista Alberti [19] ,
dans la dédicace de son Traité de la peinture (1436), parmi les grands
novateurs de
la
Renaissance, avec l'architecte Filippo
Brunelleschi et les trois sculpteurs Donatello, Lorenzo Ghiberti et Luca
Della Robbia,
artistes dont le génie est tel qu'on ne peut « les faire passer après
aucun
artiste aussi ancien et fameux qu'il soit dans ces différents
arts »
Delacroix: l'influence de Masaccio sur
Raphaël :
«Deux hommes ont eu sur le talent de Raphaël une influence
extraordinaire:
Masaccio et Michel-Ange. Ils ont
fait de
lui, si on peut le dire, deux hommes différents dans les deux époques
qui
partagent sa vie. Parlons d'abord de Masaccio.
La postérité, qu'on dit si juste apparemment pour consoler ceux qui
n'ont pas
la faveur de leur siècle, a mal traité bien des hommes dignes d'un
meilleur
sort, ou plutôt, l'ingrate qu'elle est, elle a souvent immolé une gloire
ancienne à une nouvelle. Elle a caché la figure de Masaccio derrière les
rayons
dont elle a entouré Raphaël; et peut-être qu'un demi-siècle plus tard,
un si
beau génie eût eu une destinée toute contraire. Né misérable, presque
inconnu
pendant la meilleure partie de sa courte vie, il a opéré à lui seul dans
la
peinture la révolution la plus importante qu'elle ait subie. C'est de
lui que
date la splendeur de l'école italienne. Jusque-là, elle n'avait point
rencontré
ce charme qui lui est particulier, des expressions vraies jointes à une
grande
beauté et à une grande pureté. Les mérites et les défauts des peintres
italiens
qui l'ont précédé se confondent avec ceux des écoles allemandes, quoique
dans
le Giotto, Cimabue et quelques autres un peu postérieurs, tels
que Gozzoli,
Orcagna, etc., la tendance vers la beauté fût déjà sensible.
Masaccio agrandit le caractère du dessin: il
débarrassa ses
figures de ces plis mesquins et serrés autour du corps comme des langes,
qui
semblaient les emprisonner plutôt que les couvrir. Il connaît les
raccourcis,
et ses figures ont vraiment de la vie et du mouvement. Dès lors, le
retour vers
la sécheresse des premiers âges fut impossible. Qui peut dire ce qu'il
eût
rencontré de perfections nouvelles dans un âge plus mûr; et qui
affirmerait qu'il n'eût pas, effacé Raphaël lui-même? La douceur de ses
mœurs
et une vie presque ignorée ne purent trouver grâce aux yeux de
l'envie... Le
poison trancha ses jours, et il expira au milieu de ses
chefs-d'œuvre, à
un âge où d'autres s'essayent encore.» EUGÈNE DELACROIX,
"Raphaël", Revue de Paris, 1830.
Marc di Napoli [20] (Atelier
Bleu de Naples)
Extrait: «Les peintres ont intégré dans leurs oeuvres cette
notion
fondamentale de la carnation pour mieux en visualiser la réalité.
Masaccio le
novateur, sera le premier à représenter dans ses peintures la carnation
humaine
du divin.»
Annexe II- Une ressemblance étonnante : LE SUAIRE DE TURIN et LE VISAGE du Christ des fresques du
peintre MASACCIO
C’est un artiste
Hongrois, Ferenc Svindt, graveur de timbres, qui a fait cette découverte
: Le
Visage du Père, de Masaccio sur une
fresque dans le couvent de Santa Maria Novella à Florence et le visage
de
l’Homme du Suaire de Turin ont une ressemblance étonnante . Ferenc
Svindt a
produit ainsi une " image des deux visages " qui a été tirée en
timbre par les Postes de Hongrie à Pâques 1999. C’est certainement le
début
d’une aventure qui n’a pas dit son dernier mot.
Voici comment il explique sa découverte :
" On
m’avait demandé de peindre une image pour décorer l’autel dans une
grande
réunion religieuse où devaient venir des
milliers de
personnes,
la
Rencontre Nationale du Renouveau en Hongrie. Comme je
suis
moi même croyant, j’ai prié avec ma femme, et mes frères de
la Communauté Emmanuel,
et je pensais à peindre le visage du Sauveur tel qu’on le voit sur le
saint
Suaire. Au cours d’une prière de louange du matin on m’a communiqué cet
texte
de l’Ecriture : " Si donc j’ai trouvé grâce à tes yeux, daigne me faire
connaître tes voies… " - Yahvé dit " Ma face vous accompagnera…
"(Livre de l’Exode, Ch 33, versets 13 à 16. )"" Au début je
voulais simplement agrandir une photo du Saint Suaire et la copier sur
la
toile, car je n’osais pas créer moi même un visage de Jésus. Mais j’ai
vite
compris que ce n’était pas faisable. "" Alors j’ai feuilleté des
livres d’art pourvoir comment les grands maîtres de la peinture avaient
représenté le visage du Christ. Et c’est ainsi que j’ai découvert une
ressemblance étonnante entre le visage de Dieu le Père d’une fresque du
peintre
Masaccio et le visage se trouvant sur le Saint Suaire. Il s’agit d’une
fresque
représentant la sainte Trinité, dans l’Eglise Santa Maria Novella à
Florence.
" " Plus, après une analyse comparative menée sur mon ordinateur,
j’ai été bouleversé : j’ai découvert que, non seulement les deux visages
se
ressemblent beaucoup, mais que leurs traits principaux sont pratiquement
identiques. " " Il est peu probable que Masaccio ait pu voir le
Suaire car à cette époque, la fin du XIVème siècle et début du XVème, le
saint
Suaire était gardé en France, et je n’ai trouvé aucune allusion dans la
biographie de Masaccio à un voyage dans ce pays. De toute façon, je suis
convaincu que, même s’il avait vu le fameux linceul tel qu’il se
présentait
alors, sans l’aide de la photographie, il n’aurait pu voir qu’une image
négative et quelques taches à peine visibles. Je crois que la fresque de
Masaccio est une œuvre inspirée, inspirée par l’Esprit Sainte. En la
voyant
j’ai compris que le Père s’est véritablement révélé dans le Fils, et par
le
Saint Esprit, selon ces paroles de Jésus dans l’Evangile de saint Jean :
"
qui m’a vu a vu le Père ". Et moi en voyant le visage du Christ dans le
Suaire et celui du Père dans la peinture de Masaccio, le mystère de
l’unité du
Père et du Fils est devenue pour moi plus réelle, plus accessible. ""
Et maintenant, je rends grâce au Seigneur d’avoir pu réaliser cette
image des
" deux visages ". On ma demandé d’en faire le timbre de Pâques 1999
pour les Postes Hongroises, et je suis heureux qu’au delà du timbre,
cette
" image des deux visages " puisse être regardée par beaucoup, et
qu’elle leur parle du Père et du Fils ". (Photos
Internet)
Annexe
III
Le travail de la fresque
Dès l'époque
romane, le travail de la fresque était réalisé par "pontate".
Grâce
aux échafaudages ("ponte"), on travaille à partir de la partie
haute et à chaque fois que l'on passe à un niveau inférieur, on doit
faire des
raccords.
|
Ci-contre,
le travail par bandes horizontales ("pontate" ou
"pontaggi") C'est le cas du
travail de Giotto dans l'église S. Croce à Florence.
L'auteur
note que les trous dus aux échafaudages sont parfois visibles
aujourd'hui. Ils ont été camouflés par de l'intonaco qui n'a pas
toujours
résisté au temps. Désormais
la
réalisation de la fresque n'est plus liée à la position des
échafaudages mais
à la décision des ouvriers quant à la surface à réaliser dans le cadre
d'une
journée de travail. Une couche légère d'intonaco ("velo") est
d'abord appliquée sur la portion du mur que l'on prévoit de peindre
avant la
fin de la journée. Une attention majeure est apportée pour masquer les
joints
entre deux journées : ces interventions sont seulement faites à la
tempera.
D'où l'intérêt de techniques pour prolonger l'humidité. (Photo
Internet) |
Ainsi dans l’église de S.
Francesco, à
Arezzo, Piero della Francesca a eu recours à des piles
de
linge mouillé qu’il appliquait sur la surface enduite pour qu’elle reste
fraîche jusqu’à ce qu’il soit prêt à la peindre ! L'habileté de
l'artiste est
donc décisive ainsi que l’importance du sujet à traiter. Giotto,
par exemple, dans Le Jugement dernier de Padoue, a pu peindre
en une
seule fois une douzaine de têtes du groupe des Élus, ou au contraire
consacrer
toute une séance à un seul portrait comme celui du donateur Enrico
Scrovegni.
A l'occasion de la
restauration de
la Chapelle Brancacci,
à Florence, la délimitation et la numérotation des journées "giornate" sont figurées sur une
photographie de la fresque de Masaccio « L'ombre de saint Pierre.» Les
flèches
indiquent le sens du recouvrement par la peinture aux limites des
"giornate". Les visages, on le conçoit aisément, représentent des
"giornate" de plus petite surface alors que le sol ou les murs sont
travaillés par unités plus vastes. On sait que dans certains cas —et
ceci se
retrouve dans les tableaux peints à l'huile du XVIè au XIXè siècle— le
maître
se réserve les morceaux de choix (le portrait par exemple) et laisse le
reste à
ses élèves. Masaccio était seul à exécuter ses fresques.
L'étude attentive des
différences de
couleur permet de distinguer les limites des "giornate". Prenons
l'exemple, toujours à
la
Chapelle Brancacci, d' «Adam et Ève chassés du paradis
terrestre» :
|
|
Autour de l'Ange, le ciel est plus clair par manque
d'azurite alors qu'autour d'Adam on a un bleu d'azur plus soutenu qui
correspond à la "giornata" de la réalisation du corps d'Adam par
Masaccio. Dans le cas précis de cette œuvre, l'incendie de
1771 a aussi
détérioré
certaines couleurs : derrière la tête d'Adam, il devrait se trouver
des
rayons dorés mais la peinture dorée a fondu et ne reste que son
support foncé
Photo Internet |
Les images à réaliser sont souvent dessinées
en contour à
l'ocre rouge. Dans certains cas, on note la présence de crayonnages,
tracé sur
le plâtre frais, pour aider à la figuration. Une fois que le
dessin est
recouvert, le peintre doit se fier à sa mémoire, ou bien suivre un
projet à
l'échelle.